Adélaïde: "la féline"
Peut-être, parce qu'elle a longtemps dansé, son corps obéit et se courbe sans effort apparent.
Son esprit vagabonde, son regard se pose ici ou là.
Elle poursuit la conversation, naturelle, sans fard.
Et, vous vous étirez, en grimaçant, sans oser vous plaindre.
Pour elle, tout cela a l'air si facile.
Ses yeux se posent sur vous, d'un bleu si profond, qu'on s'y noie.
Et, ils captent tout, observent tout, filtrent tout.
Assurément, elle a du caractère, du tempérament, l'esprit d'indépendance.
Il n'en fallait pas plus, pour qu'elle parte tôt de son Périgord natal et s'installe à Paris.
Depuis, elle travaille, écoute, assure, rassure: commerçants, artisans, professions libérales...
Elle joue en solo, convainc en tête à tête, et repart aussitôt à la conquête de "nouveaux prospects".
Autant vous le dire tout de suite, ce n'est pas de tout repos.
Alors, elle a senti l'impérieuse nécessité de constituer un cercle de relations, d'amis, d'intimes.
Et pour en faire partie: "il faut montrer patte blanche" Sinon, gare
! Adélaïde sort les griffes...
Les sports, les loisirs, les soirées, elle les joue "collectifs"
C'est toujours elle qui bat le rappel.
Que ce soit pour assister, entre filles, à la diffusion de "l'amour est dans le pré" en dégustant de savoureux, muffins, cookies, crumbles, macarons, tous "préparés maison" ou pour participer, au cross du "Stade Français".
Avec elle, la course à pied devient un sport d'équipe, un jeu qui se
termine toujours par une fête.
Elle est aussi bavarde que Chloé et Charline réunies, mais, elle ne se fait jamais pincer
Daniel et Clément cherchent en vain la recette.
Pour autant, Adélaïde est persévérante.
La course à pied exige des efforts, de la détermination, de la pugnacité.
Et comme Adélaïde n'est dénuée d'aucune de ces qualités, elle progresse, par petites touches, sans qu'on y prenne garde.
Au moment opportun, elle sait se concentrer, se recentrer à l'entraînement, comme en compétition et atteindre ses objectifs.
Pour réaliser successivement: 1h40 sur semi-marathon et 44'38 sur 10 km.
Avant de se tourner vers le marathon de Paris, en avril prochain.
Et oui, Adélaïde, désormais, il faudra aussi se lever de bonne heure, le dimanche !
Jean-Jacques
Stéphane, l’homme qui rit dans sa barbe
Il arrive d’un pas alerte, le talon qui claque, le pli impeccable, l’oreille exercée. Le regard malicieux, un sourire moqueur. Ça y est. Du premier coup d’œil, Il a photographié la scène. Maintenant, il peut fermer les yeux, ou détourner le regard. Soudain, on peut voir comme une lueur sur son visage, l’accentuation de son sourire, et presque y déchiffrer une remarque espiègle, encore retenue, mais prête à fuser. Instinctivement, on se tâte, on s’inspecte pour devancer sa remarque. Quelle est la couleur de ma chemise, déjà ? Froissée, repassée? Les chaussettes sont-elles assorties au pantalon ? Ça ondule sur son visage, ça vibre, ça vous envoie des éclairs.
Stéphane rit sous cape, Stéphane vous regarde, il attend que vous dégainiez le premier. Que vous lui lanciez la première boutade. L’expression de son visage devient caractéristique. Il sourit, il attend. Il vous laisse lancer la première salve. Après, ce sera son tour. Oui, l’échange doit se faire pas l’humour, fait de petites piques inoffensives mais affectueuses.
Stéphane rit dans sa barbe (parce que maintenant, il porte une barbe), quoiqu’il ne sache pas encore pourquoi il rit. Il anticipe le mot que vous allez lui dire, il attend, il se tend vers vous, il vous encourage à vous lancer, il semble se demander : Mais qu’est-ce qu’il va encore inventer ?
Stéphane, l’homme léger par excellence, sensible aux nuances de tons, aux gammes de camaïeux, aux vibrations de la voix plus qu’à l’idéologie du propos. Il est antiraciste sans le savoir, gay friendly sans chercher à le prouver. Féministe sans savoir pourquoi. On dirait que pour lui, il n’y a que des vérités multiples, changeantes, qui nous plaisent aujourd’hui et se dissiperont demain parce que la terre aura tourné. Pour lui, rien de plus durable qu’une odeur d’herbe mouillée, de branche écrasée sous nos pas, rien de plus durable que les odeurs qui s’entrecroisent dans les chemins où l’on court.
Oui, parce que j’allais oublier, Stéphane court. Mais comme un dilettante, dirait-on, toujours avec un petit sourire en coin, qui semble signifier : la performance s’obtient de surcroît! Presque par inadvertance. C’est comme cela qu’il est passé sous les 39 aux 10 km en 2010 (38’34 aux 10 km de Paris centre), puis sous les 38, pour amener son record à 36’28 à Montereau. Au semi-marathon de Paris, il a couru en 1h22. Et le marathon ? Mais je ne sais pas s’il a jamais couru un marathon, sauf comme accompagnateur… Ah oui, il a fait le marathon-relais du Val de Marne en 2010, et il a fini en… en… 2h 56, c’est pas mal, non, en moins de trois heures, même si c’était en équipe, et quelle équipe ?
Voilà. Le portrait est fini. Il manque une conclusion. En général, la conclusion doit comporter un encouragement pour le futur, la foi en l’avenir de l’athlète du moment. Mais bon, je vois déjà deux petites rides se plisser au coin de ses yeux, une expression hilare se dessine sur son visage : abrège… abrège ! Y a encore 10 fois quatre cents mètres qui nous attendent sur la piste.
Alors, ce sera un portrait sans conclusion.
Jean-Marc Geidel